Quelle moto pour les permis A2 ? Pas si simple…
En changeant les règles pour les jeunes passant le permis moto, la 3e directive européenne du permis de conduire conserve l’intérêt de l’accès progressif à la puissance. Certes le système est encore loin d’être parfait ou totalement cohérent – on peut ainsi trouver incongru d’imposer les motos bridées en fonction de l’âge au moment du passage du permis plutôt que de l’expérience (on peut être grand débutant à 50 ans, ou avoir 10 ans de bécane dans les pattes à 22 ans…), ou dans le fait que ça ne concerne que les deux-roues, mais le principe général de se former sur des véhicules de puissance modérée avant de passer sur plus pêchu n’est pas absurde.
Pour rappel, jusqu’à la réforme, les jeunes passant le permis avant 21 ans ne pouvaient conduire de moto de plus de 25 kW, soit 34 chevaux, pendant deux ans, puis passaient automatiquement en « full » (enfin, 100 chevaux pour la France). Depuis le 19 janvier 2013, l’âge est remonté à 24 ans, mais en contrepartie la puissance est passée à 35 kW, soit 47,6 chevaux (35 kW X 1,36, le taux de conversion KW/CV), devenant une nouvelle catégorie de permis, le A2. Mais attention, la puissance seule ne fait pas tout : le véhicule doit aussi répondre à un critère de rapport puissance-poids de 0,20 (soit un deux-roues d’au moins 175 Kg : 35 kW/175 = 0,20) ET au fait que la moto ne doit pas être dérivée d’un véhicule faisant à l’origine plus du double de la puissance bridée (donc 70 kW / 95,2 chevaux maxi pour une moto de 35 kW, 50 kW / 68 CV pour une 25 kW, etc.).
Si ce dernier critère est inoffensif en apparence, en pratique il pose bien des problèmes pour la France. En effet, les jeunes conducteurs ont rarement les moyens de s’offrir une moto neuve, et se tournent donc vers l’occasion. Or que trouve-t-on en seconde main pour cette catégorie de permis ? Soit des utilitaires, style scooter ou petite cylindrée, soit des motos bridées à 25 kW (34 chevaux)… mais qui sont dérivées pour la grande majorité de motos trop puissantes à l’origine (+ de 50 kW / 68 CV) !
Moralité, si un jeune permis A2 peut conduire une moto neuve de 35 kW / 47,6 CV, la même d’occasion en 25 kW / 34 CV lui est légalement interdite. Il serait à son guidon considéré comme conduisant sans permis (= avec un permis dont la catégorie ne correspond pas au véhicule conduit), pour autant qu’il savait, et qu’on puisse lui opposer qu’il savait que la moto faisait à l’origine plus de 50 kW… En effet, comment pourrait-il le savoir, puisque la puissance affichée sur le certificat d’immatriculation, c’est uniquement la puissance bridée, pas la puissance originelle. Que l’on sache, on n’est pas censé être un cador de la mécanique et savoir lire une fiche technique, ce n’est pas inscrit dans la loi… En pratique le risque administratif peut sembler faible, mais on n’est jamais à l’abri d’un contrôle tatillon, sous réserve quand même que les forces de l’ordre connaissent la puissance originelle de toutes les motos (et comment vont elles le savoir ?). Et du côté de l’assurance, en l’état actuel des choses un assureur qui accepterait le risque serait soit mal documenté, soit sciemment en illégalité. Quid alors de vos droits en cas d’accident ? Tout ça pour conduire une moto moins puissante que le maximum auquel vous avez droit… Absurde ? Difficile de dire le contraire. Quelle solution alors ?
· changer le bridage de la moto : contre quelques centaines d’Euros, il est techniquement possible de passer une moto de 34 chevaux à 47,6 CV, mais à condition que le constructeur ait fait la démarche d’homologation nécessaire pour obtenir le certificat d’immatriculation qui va bien, ce qui est loin d’être leur volonté, afin de « soutenir » la vente des motos neuves, qui a bien besoin de ce coup de pouce. Une homologation à titre isolée serait une solution envisageable, mais il faudrait arriver à mettre la moto aux normes antipollution actuelles, autant dire que cela est impossible et/ou très coûteux à faire. A noter aussi que les concessionnaires semblent maintenant refuser de brider les motos en 34 chevaux, même pour les modèles homologués pour… bah oui, plus intéressant de vendre du neuf. Mais dommage si ça détourne à jamais des futurs motards de pouvoir se payer une machine pour apprendre !
· regarder bien en détail si la moto est compatible malgré tout. Pour cela,
la Mutuelle des Motards met à votre disposition un outil très pratique, si vous avez déjà un véhicule précis en tête et souhaitez vérifier sa compatibilité avec votre permis. Mais attention : la Mutuelle des Motards a sciemment choisi de faire fi de cette règle absurde. Aussi, tous les modèles bridés à 25 kW / 34 CV sont accessibles chez elle pour un permis A2, même ceux qui ont une puissance originelle de plus de 50 kW (+ de 68 CV), à condition qu’ils soient déjà bridés.
· se contenter d’une plus petite cylindrée ou puissance : en effet, avoir le droit de conduire une 700 n’empêche pas de se faire plaisir avec une 300… sauf qu’avant la nouvelle génération, il n’y en avait pratiquement plus sur notre marché, donc l’offre d’occasion est faible.
· enfin, il n’y a pas que les roadsters dans la vie ! Toutes les motos bridées à 34 CV faisant d’origine moins de 68 chevaux, sont compatibles avec le permis A2, et il y en a (trails modernes, customs, utilitaires…). Cela exclue des machines populaires comme l’ER-6, mais laisse pas mal de choix quand même. Il ne faut pas non plus oublier les modèles « naturellement » accessibles au permis A2 comme le T-Max par exemple et les vieux trails. Certes, pour les motos d’avant 2004, la puissance et le rapport puissance/poids ne figurent pas sur le certificat d’immatriculation. Mais c’est le problème des forces de l’ordre, pas le votre, c’est à elles de prouver que la moto que vous conduisez n’est pas compatible avec votre permis, et non l’inverse. Nous lui souhaitons bien du courage… Encore une raison objective pour que les ministères accèdent à la demande légitime des motards de changer la règle : comment faire appliquer une règle si elle ne peut être vérifiée ?
Merci à E. Marot de l’AMDM pour les précisions
NOTE : Nous recevons beaucoup de questions et demandes de précision sur les motos, ce qui est normal car le sujet est complexe. Mais la plupart des cas ont déjà été traités dans les commentaires ci-dessous. Avant de poser une question, merci de prendre le temps de vérifier qu’un cas similaire n’a pas déjà été répondu, et n’oubliez pas de consulter l’application de la Mutuelle des Motards, régulièrement mise à jour.